FO pleinement mobilisée pour les livreurs à vélo travaillant pour les plateformes

En assouplissant les conditions d’accès au fonds de solidarité destiné aux travailleurs indépendants, l’exécutif répond à une revendication de FO, qui l’a alerté sur les difficultés rencontrées par les livreurs à vélo travaillant pour les plateformes numériques. Pour la confédération, ils ont été les laissés-pour-compte des mesures d’urgence.

La revendication de FO a été entendue. En assouplissant le 1er mai les conditions d’accès au fonds de solidarité destiné aux indépendants (et aux petites entreprises les plus touchées par la crise sanitaire), l’exécutif a répondu à l’une des demandes formulées par la confédération, particulièrement mobilisée sur la situation des livreurs à vélo qui travaillent, sous statut d’autoentrepreneur, pour les plateformes numériques de type UberEats ou Deliveroo.

Dès le 15 avril, soit à l’issue du premier mois de confinement national, le secrétaire général Yves Veyrier et Béatrice Clicq, secrétaire confédérale au secteur de l’égalité et du développement durable, ont demandé à la ministre du Travail de prendre au plus vite des mesures assurant la santé et la sécurité des livreurs à vélo. Il faut les indemniser en cas de confinement et garantir leur sécurité lorsqu’ils continuent leur activité, écrivent-ils dans une lettre adressée à la ministre, et qu’elle a transmise à son homologue des Finances.

Des travailleurs laissés sans protection financière

Plus qu’une lettre, c’est une alerte. La confédération juge que les livreurs à vélo travaillant pour les plateformes numériques sont les laissés pour compte des mesures d’urgence. Le bilan de FO, établi à l’issue du premier mois de confinement national, est sévère : Les diverses mesures d’urgence ne les concernent pas ou sont conditionnées à un chiffre d’affaires, à une période d’ancienneté et à des démarches individuelles non connues ou trop complexes pour cette population dont une partie ne maîtrise pas l’utilisation des formulaires administratifs.

Le chômage partiel ? Les livreurs à vélo en sont exclus : comme ils ne sont pas salariés, ils ne cotisent pas pour le chômage, auquel ils ne peuvent prétendre qu’en cas de liquidation judiciaire. Ils n’ont donc pas droit aux indemnisations pour activité partielle.

L’arrêt de travail pour garde d’enfant de moins de 16 ans ? Difficile à obtenir. Non seulement il est conditionné à une période d’affiliation de 12 mois, mais la démarche individuelle à réaliser sur le serveur Ameli.fr est souvent un frein. Conséquence, constate Béatrice Clicq, très peu de demandes avaient été formulées à l’issue du premier mois de confinement national. La possibilité d’arrêt de travail pour garde d’enfant de moins de 16 ans est un droit méconnu par les livreurs à vélo, déplore-t-elle.

Fonds de solidarité : les premières conditions ont jeté le trouble

Quant au fonds d’urgence proposant aux travailleurs indépendants une aide forfaitaire pouvant aller jusqu’à 1.500 euros ? Dans sa lettre du 15 avril, FO fait le même constat : il est difficile d’accès. Car pour pouvoir prétendre à ce fonds, les livreurs à vélo doivent engager une démarche individuelle pouvant s’avérer très complexe pour une partie d’entre eux. Autre frein, pointé par Béatrice Clicq, il faut impérativement être à jour de cotisations, or une très large majorité de ces travailleurs ne le sont pas du fait du transfert de responsabilité de la plateforme vers le livreur. Sans compter les critères d’accès liés à l’ancienneté jugés très restrictifs par la secrétaire confédérale.

Pour recevoir l’aide au titre du mois de mars, les livreurs à vélo doivent alors justifier d’une baisse de 70% de leur chiffre d’affaires entre mars 2019 et… mars 2020. Cela excluait d’emblée les nombreux livreurs n’ayant pas un an d’activité, commente Béatrice Clicq, qui rappelle que l’ancienneté moyenne dans le secteur est de quelques mois.

Sur ce point, la revendication a été entendue. Les nouvelles conditions d’accès au fonds ont été assouplies, y compris pour mars. Pour l’octroi de cette aide plafonnée et défiscalisée, la règle portant sur les modalités de prise en compte de la baisse du chiffre d’affaires a en effet été modifiée. En effet, cette perte de chiffre d’affaires n’a plus à être d’au moins 70% mais de 50%. Par ailleurs, pour les entreprises crées après le 1er mars 2019, c’est le chiffre d’affaires mensuel moyen, depuis la création de l’entreprise jusqu’au 29 février 2020, qui est retenu. Pour les microentreprises et celles relevant des BNC (bénéfices non commerciaux), c’est le chiffre d’affaires moyen depuis la création de la structure qui est pris en compte et comparé à la période des mois d’entrée dans la crise. Un décret du 16 avril dernier est venu préciser et élargir les conditions d’octroi de l’aide du fonds de solidarité lequel est renouvelé jusqu’en mai, et doit l’être jusqu’en juin pour certains commerces, tels les cafés et restaurants

Santé et sécurité : des plateformes « déresponsabilisées »

Mais pour FO, les livreurs à vélo n’ont pas été que les laissés-pour-compte des mesures d’urgence financière, ils l’ont aussi été des mesures de sécurité sanitaire. Et ce, alors qu’ils ont été contraints, faute de filet de protection financière, de continuer à travailler en s’exposant au risque de contamination ! Contrairement aux entreprises employant des salariés, les plateformes donneuses d’ordres n’ont aucune obligation de résultat en matière de santé. Elles sont déresponsabilisées des conséquences de la pandémie sur leurs livreurs, dénonce Béatrice Clicq.

Résultat, chacune décide des moyens à déployer ou non. Toutes semblent avoir mis en oeuvre « la livraison sans contact » préconisée par l’exécutif. Mais elles ne sont pas allées beaucoup plus loin en matière de prévention, constate la secrétaire confédérale. La distribution de gel hydroalcoolique, de masques, de gants aux livreurs ? Mi-avril, elle était marginale. Certaines plateformes ont purement renvoyé la responsabilité de l’achat aux livreurs (en proposant un forfait de 25 euros), alors que les produits restaient introuvables.

Et il n’y a pas plus de garantie collective quand les livreurs sont atteints du Covid-19 : certaines plateformes les indemnisent pendant la quatorzaine, d’autres non. Et le montant de ce soutien financier est à géométrie variable : une plateforme le calcule en fonction des heures effectuées ; une autre se base sur les six derniers mois que le coursier ait travaillé ou non durant toute cette période, et y ajoute 25 euros par jour, prévu par un contrat d’assurance !

Face à cette situation, la confédération continue d’appeler le ministère du Travail à prendre des mesures. Pour FO, il est impératif que les plateformes soient contraintes de garantir la sécurité des livreurs en leur fournissant les équipements nécessaires pour effectuer les livraisons dans les meilleurs conditions. Le message ne saurait être plus clair.


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