Qu’est ce qu’une plateforme ?

Les premières plateformes de type Uber ou Deliveroo sont arrivées en France il y a une dizaine d’années. En peu de temps, elles ont révolutionné l’approche des clients traditionnels de services tels que les VTC ou la livraison de repas. En une décennie, elles se sont imposées comme un acteur majeur et incontournable de nombreuses prestations de service.

Elles ont également bouleversé le rapport au travail de nombreux citoyens. Parmi vous, chauffeurs, livreurs ou quelle que soit votre spécificité, bon nombre ont du au départ considérer le modèle des plateformes comme une opportunité de développer différemment votre carrière professionnelle. Et dans un premier temps, vous n’avez pas eu à le regretter.

Pour certains, l’émergence des plateformes a même été le levier qui vous a permis d’accéder -ou de réaccéder- à un travail. Chômeurs longue durée, salariés en quête d’indépendance, jeunes éloignés du marché du travail, issus de milieux défavorisés, ou ayant connu l’échec scolaire, ou tout simplement étudiants, vous avez tous a priori bénéficié de l’offre des plateformes numériques.

Les premiers temps, tout allait pour le mieux : le faible nombre des travailleurs se tournant vers les plateformes justifiait une tarification correcte, la possibilité de choisir vos horaires vous permettait d’adapter votre rythme professionnel à vos besoins et l’indépendance promise par le système des plateformes correspondait pleinement à vos aspirations.

Mais les temps ont changé. En effet, les plateformes numériques ont construit leur modèle sur ce qu’on appelle en droit un vide juridique : celui d’entreprises basant leur business modèle sur l’indépendance de ses prestataires pour s’exonérer des contraintes du salariat : protection, cotisations sociales, droit du travail.

Et aujourd’hui, maintenant que le marché a explosé et que les plateformes sont devenues des géants implantés dans toutes les grandes villes de France, la réalité est nettement moins avantageuse : diminution continuelle des tarifs (à tel point que certaines plateformes font désormais appel à des sans-papiers corvéables à merci), surveillance permanente des algorithmes, pressions de toutes sortes pour vous inciter à vous connecter à certaines heures, déconnexion en guise de sanction.

En fait, les plateformes utilisent désormais ce que l’on appelle les trois pouvoirs attribués généralement à une situation de salariat : pouvoir de direction (on vous donne les ordres par l’application), pouvoir de contrôle (via l’algorithme et la localisation GPS), pouvoir de sanction (déconnexion si la prestation n’est pas jugée satisfaisante). Drôle de notion de l’indépendance.

D’autant plus que vous ne bénéficiez pas des trois critères qui, cette fois, définissent l’indépendance : libre choix de la clientèle, des tarifs et des horaires de travail. On se retrouve donc dans une situation ou des trois critères du salariat, la plateforme les réunit tous et des trois critères de l’indépendance, elle n’en réunit aucun. C’est cela qu’on appelle le vide juridique : la loi ne connait pas cette situation.

C’est la raison pour laquelle certains d’entre vous ou de vos collègues ont multiplié ces dernières années les recours au tribunal pour requalifier la relation qui les unit aux plateformes en contrat de travail. Dans la plupart des cas, le verdict leur a donné raison. Et verdict après verdict, c’est l’ensemble du modèle des plateformes qui était fragilisé.

Logiquement, le Gouvernement s’est donc saisi de la question. Car les plateformes sont à ses yeux indispensables : à court terme, elles lui permettent d’améliorer les chiffres du chômage et à long terme, elles offrent une opportunité pour nombre d’entreprises issues de plusieurs secteurs d’activité de se libérer des contraintes du salariat. C’est ce qu’on appelle l’ubérisation de la société.

Dès lors, plutôt que de trancher sur la question du salariat, le Gouvernement a décidé de mettre en place une représentation des travailleurs des plateformes. En mars 2022, vous serez donc appelés à élire vos représentants, à l’image de ce qui se pratique dans les entreprises « traditionnelles ». C’est précisément là que Force Ouvrière peut vous offrir son expertise.


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